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tout y passe

• L'art délicat de la provocation

Publié le par brouillons-de-culture.fr

• L'art délicat de la provocation

Provocation et transgression sont les mamelles de l'homme libre. Pourtant rarement ces deux mots auront-ils engendré autant de confusion qu'à l'époque qui est la nôtre. Beaucoup s'en revendiquent, dans une posture qui confine à l'imposture. Un peu comme la poésie en fait, mais ceci est une autre histoire.

Provoquer, c'est aussi inciter au duel. On ne provoquait guère en duel quelqu'un dont les idées étaient aux antipodes de celles que vous professiez. Ces dernières fussent-elles délirantes. Mais bien parce qu'il tentait de ridiculiser les vôtres, et était, la plupart du temps, à deux doigts d'y parvenir.

Faute d'une grille de lecture appropriée, un certain nombre de personnes en viennent à penser que Desproges, Coluche et Dieudonné sont bel et bien de la même famille. Ou qu'Alain Soral est un penseur libre, indépendant, non formaté.

Provoquer, c'est inciter à sortir de sa zone de confort intellectuel, déclencher un processus de réflexion en s'attaquant aux tabous et idées reçues d'une époque. Métier noble s'il en est. Ce n'est aucunement prêcher des convaincus et révulser les autres. Desproges, Coluche étaient provocateurs, Dieudonné et Soral ne sont que des pamphlétaires de bas étage.

Les fast-foods de la simili-provoc fleurissent d'ailleurs un peu dans tous les arts. Un signe qui trompe rarement : une tendance prononcée à l'auto-proclamation permanente. "Je suis un provocateur moi monsieur, un rebelle" avec bien entendu à la clé nombre de références ronflantes, de citations de ceux qui vous ont précédé (selon le domaine artistique, Bunuel, le surréalisme, Gainsbourg, Bukowski et j'en passe).

• L'art délicat de la provocation

Un exemple parmi tant d'autres : le relativement récent "Deadpool". À en croire ses promoteurs, nous serions en présence d'un film incorrect, impoli, grinçant, qui déboulonne le mythe des super-héros. Une déclaration à l'emporte-pièces qui semble ne pas prendre en compte les multiples tentatives (très souvent réussies) dans le neuvième art de décapage, accomplies depuis quelques décennies.

• L'art délicat de la provocation

Des travaux de Frank Miller sur Batman, qui en fit le psychopathe que nous connaissons à présent à la série "Preacher", en passant par le culte "Judge Dredd" à l'humour ubuesque. Soyons bons princes : sans doute ne se réfère-t-on ici qu'au versant cinématographique, où les tentatives sont plus rares.

L'ennui, c'est que la réalité est toute autre : Deadpool est un gros film bourrin (par ailleurs plutôt regardable en tant que tel) qui tente de se faire passer pour un film politiquement incorrect, en épiçant de ci de là son propos de jurons bien sentis et d'allusions salaces.

Des transgressions somme toutes très gentillettes, bien en deçà du tonitruant effet d'annonce. Bien moins dérangeant en fait que "Kick Ass"' ou même "Hancock", grinçants sans pour autant s'annoncer révolutionnaires.

• L'art délicat de la provocation

Verhoeven, Cronenberg, les films les plus réussis de la Sushi Typhoon ou de Troma Films demeurent autrement plus provocateurs.

"Deadpool", c'est un peu comme quand Michel Houellbecq tente de se faire passer pour Céline quand, dans la littérature qui dérange et gratte là où ça fait mal, il n'est, en dépit d'un talent certain mais souvent mal utilisé, même pas au niveau d'un Dantec ou d'un Ravalec.

Un vrai provocateur s'énonce rarement tel ; il ne l'est que parce qu'il tente des chemins peu explorés avant lui, et que certaines des voies qu'il prend dérangent. Il peut agir dans l'ombre comme dans la lumière, mais ne recherche pas nécessairement les sunlights. Son œuvre nait d'un besoin et non d'un plan carrière soigneusement orchestré.

Provoquer est un art qui ne s'improvise pas et supporte difficilement l'à-peu-près.

Pascal Perrot, texte
Gracia Bejjani-Perrot, graphisme

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• La dure loi des séries

Publié le par brouillons-de-culture.fr

• La dure loi des séries

"Maintenant, les séries, ce sont de vrais films de cinéma". La petite phrase agaçante du jour. Celle qui revient de manière récurrente dans les conversations branchées. Que doivent cautionner certains programmateurs du Forum des images qui, avec son festival "Sériemania" offre aux dites séries l'écrin d'un grand écran.

Que les séries aient, ces dernières années, fait un bon qualitatif en termes d'images, de complexité des personnages et d'audace scénaristique est un fait qu'il serait malvenu de contester. Cela n'en fait pas pour autant des chefs d'œuvres du septième art, auxquels une diffusion en salles rendrait justice.

• La dure loi des séries

Si quelques films destinés au départ au petit écran ont franchi avec succès la barrière du grand, ce sont principalement des œuvres dont les auteurs tournent pour le cinéma. On peut certes venir de la télé (comme autrefois du théâtre) et tourner pour grand écran, mais ni les techniques, ni les limites, ni les possibilités ni les exigences ne sont identiques.

J.J. Abrams (Lost, Fringe, entre autres titres de gloire) s'est fait jusqu'alors dans les salles obscures le champion de … l'adaptation de séries (Star Trek, Mission impossible). Ce qui n'est déjà pas si mal, quand on songe que Chris Carter a raté l'adaptation ciné de son cultissime "X Files". Et que même l'immense David Lynch, qui créa un mini-séisme télévisuel avec la série "Twin Peaks", échoua à son adaptation cinématographique, sans que le résultat fusse pour autant déshonorant.

• La dure loi des séries

Ce qui n'est pas sans rappeler un certain nombre de soi-disant révolutions qui ont fait flop. Il y a quelques années, les réalisateurs venus de la pub allaient, c'était certain, révolutionner le cinéma. Plus tard, c'était, promis juré craché, ceux issus du vidéo-clip. Au bout du compte, du premier, nous héritâmes d'une image très léchée, artificielle qui rend quelquefois douloureux à voir les films des années 80. Et accessoirement Etienne Chatiliez.

Du second une manière de tourner plus rapide et un sens du raccourci, de l'ellipse plutôt bienvenu … mais dont bénéficièrent surtout les réalisateurs formés de prime abord au cinéma. Ceux qui sont nés à l'image par le clip, si l'on excepte le cas Michael Gondry ; n'ont généralement pas fait long feu sur les écrans. La longévité cinématographique d'un Russell Mulcahy n'a rien de glorieux. Après avoir atteint des sommets avec ses deux premiers films, "Razorback" et "Highlander", le cinéaste a progressivement descendu les marches à reculons. Passant du haut de gamme à la série B, puis Z, et du film distribué en salles au Direct to Vidéo (DTV pour les intimes).

• La dure loi des séries

N'en déplaise aux laudateurs assidus des produits HBO ou AMC..., cinéma et télévision sont deux univers fondamentalement différents. En termes de forme comme de contenu. J'aime les séries. Cela ne date pas d'hier. Ou plutôt si. "Amicalement vôtre" "Mannix" "Kojak" "Chapeau melon et bottes de cuir" "Vidocq" "Thibaut" "Les Brigades du Tigre" "Au delà du Réel" "Mission impossible" "Starsky et Hutch" "Les mystères de l'ouest" ont rythmé mon adolescence et je leur dois de mémorables souvenirs. J'irais même plus loin, affirmant qu'ils appartiennent, à mon sens à toute culture générale qui se respecte. J'ai suivi avec ferveur chacun des épisodes de "Six Feet under", "Breaking Bad" ou de "Treme". "24 h" et chacune des séries évoquées dans cet article m'ont souvent enthousiasmé.

• La dure loi des séries

Mais cet amour ne saurait éclipser, ni même être comparé à celui que j'éprouve depuis toujours pour le septième art, qui inclut les films les moins fréquentables. Et ce, même face à des œuvres prodigieusement ratées. La confusion entre deux genres si radicalement opposés (l'œuvre télévisuelle et l'œuvre cinématographique) me semble pour le moins irritante, voire dangereuse. Même s'il convient, encore une fois, de distinguer les cinéastes tournant pour le petit écran des téléastes pur jus. A leur crédit, les productions télé ont souvent recyclé des réalisateurs du grand écran qu'un nombre trop important d'échecs avaient essoré et rendu trop peu convaincants pour des producteurs. Je pense notamment à Gilles Béhat (Urgence, rue barbare), Edouard Niermans (Anthracite, Poussière d'ange) ou Arnaud Sélignac (Nemo, Gawin, deux films superbes boudés par le public) ou encore à Yves Boisset.

Cela signifie-t-il qu'un auteur de cinéma va nécessairement apporter un plus à l'univers de la télé ? Il est difficile de répondre par l'affirmative. Certains cinéastes se sentent mal à l'aise tant avec le cahier des charges qu'avec les budgets et durées de tournage. Il arrive donc qu'il rate, même dotés d'un background important, leur passage au petit écran.

• La dure loi des séries

Il est d'excellents acteurs de télé. Cela ne signifie pas nécessairement qu'ils soient également brillants sur grand écran. De la même manière qu'un acteur de théâtre ne trouve pas toujours sa place sur pellicule. Des acteurs bouleversants sur les planches et y prenant toute leur dimension sont la plupart du temps mal ou sous-utilisés au cinéma. Voir Robert Hirsch, Jacques Dufilho, Roland Blanche ou Philippe Khorsand. On aura beau jeu de citer, dans les stars issues du petit écran Jean Dujardin, George Clooney, Clint Eastwood (la série Rawhide) Steve Mc Queen ou Johnny Deep. Mais pour ces quelques exceptions notables, on pourrait remplir deux ou trois annuaires avec tous les acteurs de série dont le cursus cinéma se décline dans le cinéma de genre, généralement horrifique, pour le meilleur et pour le pire. Les seconds rôles prestigieux y finissent souvent en chair à pâté avant la fin de la deuxième bobine. "Six Feet Under" "Treme" notamment ont ainsi fourni en acteurs nombre de cinéastes de mauvais genre.

• La dure loi des séries

Percevoir la vision d'un cinéaste ou (et) d'un auteur quand réalisateur et scénariste changent quasiment à chaque épisode relève des coulisses de l'exploit. À moins que ceux-ci ne s'éloignent du cahier des charges de la série, ce à quoi fort peu se risquent. La transfusion télé-cinéma ne s'opère pas souvent pour le meilleur : elle aboutit le plus souvent à des films très soigneusement réalisés, mais auxquels il manque une vraie personnalité d'auteur. Autrement dit près de deux tiers des récents blockbusters. Ce syndrome du réalisateur interchangeable a peu gangréné le cinéma français, sinon dans les comédies et les films d'action produits par Luc Besson (je mets au défi le plus ardent des défenseurs du bis de me citer le nom du réalisateur de "Taken, par exemple). Ce qui ne signifie nullement qu'il soit nécessairement meilleur.

• La dure loi des séries

L'affirmation qui ouvre cet article me semble d'autant plus étrange qu'elle émane souvent de personnes hermétiques aux films de genre, les plus représentés dans le monde du petit écran. Du thriller au fantastique ou à la SF. On regarde de haut la trilogie du "Hobbit" ou "Le seigneur des anneaux" mais on applaudit "Game of Thrones". On trouve Tarantino ou Hanecke trop violents, mais pas "True Detective" ou "Dexter".

La télé est un art de l'immédiat, quand le cinéma demande plus de profondeur et d'exigence. Le second peut se refuser de tout donner d'emblée. Le petit écran l'exige presque. Mais peut-être suis-je un naïf incurable de penser que le septième art sera autre chose à l'avenir qu'une constellation de blockbusters, efficaces peut-être, mais désespérément creux.

• La dure loi des séries

Pascal Perrot, texte
Gracia Bejjani-Perrot, graphisme

Publié dans tout y passe

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• Pourquoi j'aime les films d'horreur

Publié le par brouillons-de-culture.fr

• Pourquoi j'aime les films d'horreur

Depuis l'âge le plus tendre, je voue une passion sans failles -mais non exclusive- envers les mauvais genres. Je ne puis me souvenir avec précision du titre de mon premier film ; le nom de mon premier "horror movie" est en revanche gravé dans ma mémoire. "Terreur sur le Shangaï Express" de Eugenio Martin.

Le mot "horreur", dont usent beaucoup de néophytes, recouvre en fait bien des sous-genres (Fantastique, Horreur, Epouvante, Thriller horrifique...) : j'en apprécie toutes les déclinaisons. Du plus subtil au plus badplaf, du plus raffiné au plus trash, du "Seigneur des anneaux" au gros gore qui tache, de "La féline" de Tourneur à "Hostel" ou "Saw".

• Pourquoi j'aime les films d'horreur

L'explication la plus courante m'a toujours semblé, sinon sujette à caution, du moins très incomplète pour qui vit de l'intérieur l'amour des pellicules déviantes. Certes, il va de soi que ce cinéma-là joue le rôle de catharsis. Qu'il exorcise notre propre violence par procuration. Qu'il agit de même avec nos angoisses primitives, celles de notre cerveau reptilien : peur de l'obscurité, de l'inconnu, de l'abandon, de la différence, etc. etc. Mais ce seul argument ne saurait suffire à expliquer quatre décennies de ferveur.

• Pourquoi j'aime les films d'horreur

Alors pourquoi me direz-vous? Parce qu'il stimule l'imaginaire? Entre autres. Mais encore?

En premier lieu pour l'audace. Parce qu'il est avant tout cinéma de l'excès et de la transgression, dont les artisans savent qu'ils ne seront jamais jaugés à l'aune du "grand" cinéma.

Le film d'horreur s'autorise souvent à s'attaquer à des sujets tabous, auxquels un réalisateur "classique" hésitera à se confronter. Et ce, même si la censure de son temps le lui permet. Ce qui n'est pas toujours le cas.

• Pourquoi j'aime les films d'horreur

Passant par des voies détournées, parce qu'il filme ce qu'on ne filme pas, "le mauvais genre" se permet d'évoquer ce que l'on cache. Guerre du Vietnam, manipulations génétiques, dangers du nucléaire et, à l'inverse, terrorisme écologique. Mais également sujets de société : cruauté du monde de l'enfance, racisme, ségrégation, violence au féminin, ambivalence des jeux de pouvoir, intégrisme religieux, inceste, construction chaotique du sentiment maternel, déshumanisation du monde du travail, paupérisation des classes moyennes… Tout ce qu'on voudrait dissimuler sous le tapis, il n'hésite guère à le mettre sur le devant de la scène, sous une forme non didactique. Godzilla évoquait en filigrane le drame d'Hiroshima. Ce que le cinéma "normal" ne pouvait faire à l'époque.

• Pourquoi j'aime les films d'horreur

Le cinéma "qui fait peur" a toujours une ou deux longueurs d'avance sur les films "normaux", pour traiter de sujets qui fâchent.

Les femmes violentes ont dû attendre le relativement récent "L'un contre l'autre" pour être traitées par le cinéma "officiel", mais dans l'underground du bis, nombre de cinéastes s'y sont attelés. De Cronenberg (dans Chromosome 3) à Clint Eastwood (comme réalisateur avec "Un frisson dans la nuit", comme acteur dans "Les proies" de Don Siegel). Sans oublier Rob Reiner avec "Misery" ; ni les films d'horreur japonais ou les giallo italiens des seventies, dans lesquels le monstre se conjugue parfois au féminin.

• Pourquoi j'aime les films d'horreur

Dans l'autre sens, bien avant que le cinéma classique ne souligne le traumatisme du viol, un sous-genre crapuleux, le rape and revenge, y puise sa raison d'être. Franchissant sérieusement les limites du mauvais goût la plupart du temps, mais du moins ayant le mérite d'en parler.

• Pourquoi j'aime les films d'horreur

Parce que l'on n'exige et n'attend d'eux qu'une certaine efficacité, certains inventent, innovent, tant dans la manière de raconter que dans la manipulation des images. Ce n'est que lorsqu'ils quittent le mauvais genre, soit pour un cinéma "normal", soit pour une forme plus mainstream du cinéma fantastique qu'on daigne leur reconnaître des qualités de cinéaste, voire qu'on leur confère un statut d'auteur. Pourtant, Peter Jackson n'est pas moins réalisateur dans "Bad Taste" que dans "Le seigneur des anneaux", Cronenberg dans "Vidéodrome" que dans "Map of stars" ou "Les promesses de l'ombre", De Palma dans "Sœurs de sang" que dans 'Les incorructibles".

• Pourquoi j'aime les films d'horreur

Paradoxalement, si le stigmate du navet est rédhibitoire pour un film "classique", il n'en est pas toujours de même en ce qui concerne les films d'horreur. Bien sûr, il en est de navrants, d'inexcusables, totalement indéfendables. Mais également d'attachants. Aux dialogues, aux situations si décalés qu'ils frôlent le burlesque. Aux trucages et aux décors tellement "à côté de la plaque" qu'ils provoquent l'hilarité. Ou si bricolos qu'ils en acquièrent un certain charme. On trouve dans certains ratages sans appel de petites perles qui à elles seules pourraient justifier leur vision. Dans le dialogue ou dans l'image. Ainsi, je me souviens d'un somptueux "Moi j'ai regardé Dieu en face. Et vous savez quoi ? Il a baissé les yeux". Le film, lui, est parfaitement oubliable, d'ailleurs je n'en sais plus le titre.

Dans tous les films de Jean Rollin, qui fut un grand obsédé des vampires made in France, et ce, même dans les moins recommandables d'entre eux, il y a toujours quelques instants magiques.

• Pourquoi j'aime les films d'horreur

D'autant plus estimable que là où les les cinéastes tous publics se livrent à une sorte de surenchère en termes de durée (même Woody Allen ne sait plus faire court, c'est dire …) , le cinéma de genre garde une certaine décence. Les films de deux heures et plus y sont rares. Bien des maudits du septième art franchissent de peu la barre des 1h30. La plupart restent en deça. Si bien que même un mauvais film y prend peu de votre temps de vie. Ce qui est, avouons-le, un atour non négligeable.

• Pourquoi j'aime les films d'horreur

Enfin, délestés de l'obligation d'un happy end qui sonne trop souvent faux, les bad boys et bad girls du septième art peuvent s'offrir le luxe d'une alternative que le cinéma sain et bien portant s'autorise trop rarement.
Le "héros" ne gagne pas nécessairement à la fin. Le méchant n'y meurt pas obligatoirement. Le bon n'est pas toujours un type recommandable.
Bref, les possibilités sont quasi-infinies et l'élément de surprise est intact.

Pascal Perrot, texte
Gracia Bejjani-Perrot, graphisme

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• Esprit jeune, non merci

Publié le par brouillons-de-culture.fr

• Esprit jeune, non merci

Parmi les expressions dont mésuse l'époque, peu m'ont semblé si ridicules, si injustifiées que d'"avoir l'esprit jeune". Je me flatte d'avoir l'esprit vieux, il m'a fallu longtemps pour en arriver là ; c'est une conquête, pas une déchéance.

• Esprit jeune, non merci

On tend trop souvent à confondre symboles et réalité de terrain. Un réel particulièrement flexible qui ne saurait correspondre aux certitudes d'hier. A quel âge s'inscrit sur nos fronts cette dénomination discriminante : vieux ? A quarante ? Cinquante ? Soixante ? Soixante-dix ? Personne ne saurait le déterminer avec une extrême précision. Cela dépend toujours du point de vue et de l'interlocuteur.

On confond non moins souvent des qualités essentielles à la vie et celles associées à une tranche d'âge. Curiosité, capacité d'émerveillement ou d'indignation appartiennent, par exemple, à cette catégorie-là.

• Esprit jeune, non merci

L'esprit jeune comporte la plupart du temps un corolaire non moins nocif : "il est resté jeune" ou "il est jeune dans sa tête". Franchement, quel intérêt ? Celui qui serait "resté jeune" ou "jeune dans sa tête" ne saurait plus rien apporter à personne. Si jeunes et "vieux" se situent sur un même plan de réalité, adoptent strictement les mêmes codes et les mêmes valeurs à leur expérience du vivant, la transmission intergénérationnelle devient extrêmement complexe. Forme particulièrement perverse du complexe de Peter Pan.

• Esprit jeune, non merci

Que dire alors de ces oppositions quelquefois nécessaires à la construction de l'individu ?

On a vu jadis les dégâts du statut "parent-copain" qui a laissé sur le carreau nombre d'adolescents, devenus plus tard "adulescents" sans passer par le stade adulte. On commence tout juste à mesurer les ravages du fameux esprit jeune en termes de maturité et d'équilibre émotionnel.

Pour toutes ces raisons et bien d'autres, refuser définitivement cet encombrant "esprit jeune" me semble pratiquement relever aujourd'hui du devoir civique.

Pascal Perrot, texte
Gracia Bejjani-Perrot, graphisme

Publié dans tout y passe

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• Les livres de ma vie

Publié le par brouillons-de-culture.fr

• Les livres de ma vie

Un autre livre. Encore un. J’évite de m’attarder sur les pensées contradictoires qui peuvent retenir mon geste, m’épargner un nouvel achat, un encombrement de plus. Mes bibliothèques débordent d’ouvrages lus, commencés, feuilletés, relus, ou tout juste déposés sur les étagères. Mais je ne peux déjà plus y renoncer. J’en tripote la couverture du bout des doigts, regarde de nouveau le titre, le nom de l’auteur. Souris imperceptiblement de jubilation coupable, de complicité imaginée.

J’achète des livres, régulièrement. Sentiment de plénitude, évanescent mais très fort. Impression d’incorporer, en même temps que l’objet-livre que j’achète, tout le savoir qu’il contient. De faire miennes les émotions, les fulgurances qui le colorent. Comme s’il suffisait de posséder les feuilles qui en consignent le sens pour en intégrer la portée. Qu’importe qu’elles soient lues ou non, elles sont là, présentes. Potentiellement accessibles. Elles font partie de ma vie.

• Les livres de ma vie

Je regarde mes étagères, chaque ouvrage est une tête bien-aimée, disponible, prête à s’animer pour répondre au besoin du moment, à une question qui pointe. A un accès de solitude. Je vérifie, me rassure, projette de nouveaux rendez-vous, répertorie, redécouvre, picore des phrases au hasard… Proust, Bataille, Gracq, Montaigne, Apollinaire… ces hommes sont à portée de main, chez moi, avec moi.

Il ne me suffit pas d’aimer certains auteurs : j’ai besoin de leur proximité. Les incorporer autant que je suis possédée par eux. Comme si, faisant partie de mon intérieur, ils finissaient par devenir une part de moi, spirituelle mais aussi charnelle. Matérielle.

Emprunté, un livre perd sa matière, il me tient à distance. Je le lis comme on rendrait visite à un étranger ; avec plaisir, mais tout en retenue. Et certaines catégories résistent à cette légèreté. Les essais, les correspondances, la poésie, la « grande » littérature… je traverse alors le livre dont je sais devoir me séparer. Je le parcours avec une certaine hauteur, pour ne pas m’y attacher, tout en me promettant de l’acheter dès que possible.

C’est ce même doute qui m’assaille à la sortie de la librairie. Et un bombardement de questions oiseuses à ce stade. Elles n’ont pas été posées au bon moment, confirmation que la justesse est aussi une histoire de pertinence temporelle. A moins que ce ne soit leur caractère spécieux qui les autorise soudain à éclater de mille feux. Si c’était un livre de trop ? Où trouver le temps de lire ? Je l’ai peut-être déjà ? Pourquoi l’ai-je acheté ? Je vais le mettre où, celui-là ?

• Les livres de ma vie

Il est déjà chez moi. Et en fonction de la valeur impalpable mais non moins précise que je lui octroie, je lui réserverai telle ou telle place. L’éclatement spatial des livres est une constellation de mon intimité avec leurs auteurs.

Il y a ceux qui dorment à mes côtés, dont je caresse de temps en temps certaines pages, comme ces photos que l’on regarde parfois pour raviver des présences à plat. Place de haut choix, fusion si l’on veut. Seraient-ils plus résistants, je les mettrais dans mon lit.
Privilégiés aussi, les livres à ma droite, dans le bureau. A portée de main, de regard. Ce sont des textes où l’auteur s’expose, se donne. Pensées, journaux, poèmes, correspondances… Ou les dictionnaires et outils de travail. Tout près aussi. Le plus près possible, les grands écrits. Littérature qui donne toute son importance à la langue ou à la pensée.

Le plus près possible, non sans regretter à chaque fois d’avoir à éloigner de moi tel ou tel livre sous la contrainte de l’espace, qui me fixe des limites physiques et impose le réagencement permanent de ces objets aussitôt fétichisés.

• Les livres de ma vie

Puis il y a le reste. Avec une hiérarchie précise comme un nuancier de couleurs, mais comme lui, sans scission tranchée. Les étagères du haut, celles du bas, l’autre extrémité… là s’entassent les autres livres. Ceux que j’aime bien.

Moins visibles, de moins en moins visibles, sous les autres, derrière, dans des placards fermés… les auteurs que j’apprécie encore moins. Ou ceux que je ne suis pas fière d’avoir lus. Ceux que je ne toucherai plus.

Mon sac pèse de ma nouvelle acquisition. Et je ne peux m’empêcher de penser que ce que j’aime, ceux que j’adore sont aussi encombrements dans ma vie. Source de joie, mais aussi d'envahissement. A eux, toute la place.

Gracia Bejjani-Perrot, texte et graphisme

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• Salon du livre, sacre ou pacte ?

Publié le par brouillons-de-culture.fr

NOLDE-Emil.jpgDimanche 18 mars après-midi. Humeur à me perdre dans la foule, à m'abrutir du bruit des autres. De leur agitation. Une humeur idéale pour le Salon du livre. Plus de 10 ans, depuis ma dernière visite. En dépit de mon amour pour l'univers livresque, fût-il quelques fois décor de fond. Qu'importe, tant que je suis entourée de papiers, de mots, de pensées, de langue...

Je suis très vite servie en matière de foule et de perdition ; au-delà de mes attentes. Écrasée en moins d'une heure, aveuglée. Les raisons de ma désertion remontent aussitôt en surface. C'est la foire aux livres. Je retrouve en quelques minutes l'essence de mon rejet. Rien de neuf finalement, tout a juste pris de plus en plus d'ampleur. On pourrait même dire un bel embonpoint ! Mon envie de fuir est au diapason.

Kandinsky.jpgJe résiste. Change de tactique, m'attarde chez les éditeurs étrangers, plus difficiles à connaître autrement. Les Canadiens par exemple. Mais je réalise rapidement que j'ai cessé de comprendre ma langue.

Que les mots, les titres, les 4° de couv que je déchiffre pourtant scrupuleusement ne sont plus qu'images coupées de tout sens. Puis très vite, ces images se dérobent à ma conscience. Elles se démantèlent dans le brouhaha, dans l'effervescence humaine. Les mots, les images deviennent formes.

Renoncer, laisser faire. Un autre angle. Un autre regard, plus global. Qui passe par d'autres détails. Scruter les stands, les "hôtes"... mais aussi les allées. Pour capter des bribes de réponses. Qui reçoit ici ? Qui visite ? Sommes-nous si nombreux à aimer le livre ?

salon_du_livre2012.jpgLe Salon du livre, c'est aussi du spectacle, dans le sens de la représentation. Après tout, de quoi je m'étonne, c'est une exposition, non ?

Mais ce qui, dans mes vagues souvenirs, n'était que balbutiement, est aujourd'hui point de mire : l'exposition des auteurs. L'organisation des espaces, conçue autour de la foire aux auteurs. Dédicaces, dédicaces... Sacré pacte ! Planning précis, circonscrit, engagement des éditeurs pour ce défilé de visages que j'aurais aimé préserver en deux dimensions. Je comprends alors mon malaise.

Pourtant je suis passionnée par la vie des écrivains et des penseurs ; par leurs journaux, leurs correspondances, leurs réflexions... Parfois plus que par leurs écrits. Ce n'est paradoxal qu'en surface. Dans ces lectures parallèles, mais centrales, j'aspire à la vitalité de cette vie que je traque. Vitalité de la pensée livre.jpgou de l'humanité.

Que cette intimité, dévoilée, soit effleurée, effeuillée... Davantage moteur d'imagination que du réel exposé. Je ne les veux pas "en chair et en os". Je me fiche de leur gribouillis de signature : seule leur écriture m'est essentielle. Discuter avec eux ? Il me suffit que leur mots me parlent... à moins d'une véritable relation. Mais là ! Que m'importe de les croiser ? C'est comme de voir "en vrai" Madame de Bovary. Ou Baradamu. Insupportable ! Le réel s'emparant du "vrai".

Je vis l'auteur comme un personnage de plus. Doté d'une autre dimension, mais un personnage néanmoins. Il en a la teneur. Il appartient à l'univers du livre, de la création, de la pensée. L'univers prosaïque ne me déplaît pas, mais tant que nous ne le partageons pas réellement dans un lien à deux, j'ai le sentiment de rester dans les limbes de l'illusion. Du spectacle.

Me remonte alors à l'esprit la position de Maurice Blanchot. Sans image justement. Dans sa posture volontairement effacée, obstinément en retrait. Aux antipodes de cette surexposition. Blanchot, une vie "entièrement dévouée à la littérature et au silence qui lui est propre", pour reprendre les termes de son éditeur Gallimard.

Et maintenant ? À droite ? À gauche ? De nouvelles allées, les mêmes. Temps pour moi de m'éclipser, avec le sentiment de manquer une possible bonne découverte ; une potentielle belle rencontre. Difficile d'esquiver cette sensation quand tout autour, ça se lie, ça partage, ça s'exalte... Mais chacun son histoire avec le livre : je me retire ; voici la mienne.

Gracia Bejjani-Perrot 

  Peintures :
© Nolde
© Kandinsky

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• Je hais la musique.

Publié le par brouillons-de-culture.fr

Bosch18.jpgJe hais la musique. La musique que j'aime tant. Devoir subir ce bruit de fond que devient la musique, quand elle n'est pas écoutée. D'espace en espace, la même poursuite infernale, seul le rythme change. Harcèlement permanent que ce fond sonore.

Fond sonore.

Quoi de plus laid qu'un tel concept ? Quel fond ?

Pour parfaire le tableau, des écrans à présent.

Que de restaurants, de lieux publics... où les télévisions -grand écran SVP, ultra Ensor_OK.gifplat- diffusent clips ou films. Des images défilent sans texte, sans voix, puisque la musique s'acharne en parallèle. Cinéma muet façon XXI° siècle. Ni radio, ni télévision, mais des engins à fabriquer du bruit, des  formes. Partout, sans relâche. Je hais la musique. Rejet épidermique qui me submerge de violence.

fussli_silence.jpg

Tout pour que le regard ne rencontre jamais le silence ; pour que les oreilles ne se reposent guère. Au point de s'étonner quand résonnent nos voix dans un restaurant aphone. Devenus fantômes à nous-mêmes tant nos sens sont saturés...

Illustrations :
© Bosch

© Ensor
© Fussli

Gracia Bejjani-Perrot

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• Centres de... plaisir ?

Publié le par brouillons-de-culture.fr

Californie. Il y a plus de 15 ans.

L'amie qui me reçoit me propose au bout de quelques jours de séjour, d'aller dans un "mall". Un Mall ? C'est quoi ? A l'époque, je ne sais pas. Je pense à une déclinaison de Disneyland, comme le Seaworld de San Diego. Alors ce "Mallland" ou "Mallworld", quel type de parc d'attraction serait-ce ?

applaudissons.jpg 

C'était il y a plus de 15 ans, sur un autre continent. Un "peuple" lointain dont on aime à se distinguer. Ah ces Américains ! Pourtant. Dans cette bonne vieille Europe, depuis quelques années, les centres commerciaux se revêtent de leurs plus beaux atours. Se travestissent : centres commerciaux ou centres de plaisir ? Parce que je le veux bien. Je. Tu. Il. Elle.

 

centre_comm.jpgQu'est-ce qui fait préférer à une expo, les enfilades de magasins ? Il est vrai que là s'exposent des produits à portée de main, à portée de budget. Qu'un musée ou une lecture ne rajouteront pas de trophées à nos collections d'objets... leurs traces en nous jouent d'un autre registre, tout en subtilité.

 

Je ne cherche pas à interroger l'espace de consommation que sont les centres commerciaux, mais leur fonction dérivée  : lieux de loisirs, de plaisirs. Scruter ces angles qui leur permettent de se substituer aux lieux de culture, mine de rien. Glissements dangereux. Métamorphoses en profondeur que nous transmettons aux générations futures.

"Tu ne sais pas comment t'amuser ? Va faire un tour au centre commercial ! Tu n'as rien à acheter ? Et alors ! Juste pour voir !"

 

Bribes entendues :

- "Besoin de rien. Pour regarder. Et puis, ça me donne des idées."

Est-ce dans les devantures des vitrines que s'étalent dorénavant indolemment nos nouvelles sources d'idées ? Que nous puisons nos inspirations ?

- "Rien à acheter... pour simplement regarder."

Mais qu'y a-t-il donc à regarder dans un centre commercial qu'on n'aurait pas déjà vu ?

 

archi.jpgArchitectures élaborées, comme de modernes monuments d'antan. Verdure, arbres géants. Couleurs et matières nouvelles.  Raffinement extrême pour certains : les endroits "select".

Marketing étudié, sites dédiés où l'on suit l'évolution des constructions comme s'il s'agissait d'une grossesse. L'avant, le pendant, l'après. Espace, lumière, transparence... Attention, on ne peut pas les comparer à ces simples lieux commerciaux qui s'affichaient comme tels, avant l'explosion de ces nouveaux géants ! Malgré la permanence de l'offre proposée, en définitive.

 

Fête des sens : voir, toucher la marchandise. Se laisser envahir par des odeurs qui empoignent l'appétit à toutes heures. Autour d'enseignes sans surprise, resto, cinéma... saupoudrent le lieu de pincées de rêves. Air confiné, reconstitué. Saturé de musiques, d'annonces de haut parleur où des voix nous accompagnent dans notre visite. Et gratuitement ! Pas comme les audio-guides des expositions !

 

temps-.jpgTout est là pour provoquer le désir, mais quel désir ? Pour répondre à l'attente, mais quelle attente ? Pour combler un vide, mais le remplir de quoi ?

 

Tout est là pour nous distraire. Pour nous aider à tuer le temps. Mais pourquoi cette haine contre le temps ? Quand nous nous plaignons de toujours manquer de temps.

 

 

Je ne me situe pas à l'extérieur de ce format de vie. Je ne parle pas d'une quelconque place qui m'épargnerait son joug. Il m'arrive de m'y perdre. Mauvaise errance qui me coupe de toute intériorité, à l'opposé de ces promenades qui souvent ouvrent le dialogue en moi, déploient mots et pensées.

 

Ici, la déambulation tourne vite en hypnose. Je hante ces lieux, sans connections intérieures. Et d'en ressortir vidée. Sans aucune idée de ce qui m'aurait été dérobé dans ces instants de plongeons. Je n'aime pas l'idée de ce vol aveugle : si au moins je savais ce que j'y perds... à part mon temps.

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Me vient une idée en écrivant ce billet : si notre addiction à ces lieux continue, "nos fabricants de concepts" pourraient rendre les entrées aux centres commerciaux payantes ! Voila une piste à explorer  ! Pour de nouvelles formes de culture, autour du vide et du trop plein de rien.

 

Gracia Bejjani-Perrot

Publié dans tout y passe

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• Téléréalité, quelle réalité ?

Publié le par brouillons-de-culture.fr

S'il n'y a pas de rubrique "télé" sur brouillons de culture, ce n'est pas hasard ou quelconque oubli. Notre télé ne sert qu'en écran, support de DVD. A tel point que, quand un neveu débarque, on s'empêtre sans succès à trouver une chaîne qui fonctionne par le boîtier free. On n'a rien compris, même si on a free.

 

Je vais malgré tout parler de télé. Étrange choix. Pour mon 2° billet, comme pour le premier, je surfe sur un sujet étranger à mes amours. Voies indirectes que j'emprunte pour parler encore une fois de "ce qui entoure".

 

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Mais de quoi donc ? Télé-REALITE, quand tu nous tiens ! J'aimerais revenir sur des phrases souvent entendues :

"Mais c'est au second degré, au troisième degré !"...  "Je n'en rate pas une, d'émission, sauf rares exceptions, mais toujours au second degré !"... "Ben, moi je regarde, mais au second degré !" 

 

Que de fois ces parades m'ont été servies en protestation à mon étonnement. Oui, pardon, excusez-moi, soyez clément, oui ça m'étonne qu'on puisse passer sa soirée devant ce type d'émission. J'en ai vu quelques unes pour ne pas mourir idiote. ça n'a fait qu'accentuer ma stupeur. Si ce n'est pas l'engouement qui prête main forte à la télé réalité ! Quand on sait le panel des autres occupations possibles ? J'ai encore le droit de m'étonner ? D'avoir envie d'en parler ?

 

 

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Je n'écrirai pas sur la télé réalité, mais sur ces phrases ! Ces positions, ces détours par les "degrés". Au second degré ! et quoi encore ? Seule la colère me vient alors. Je n'y peux rien, un coup de sang contre ces inepties ; dangereux aveuglement ou mauvaise foi, que sais-je !

 

A me demander si je ne préfère pas les spectateurs qui assument leur premier degré. Ou le degré zéro. Qui regardent quoi ! Et ne se sentent pas obligés de passer pour intelligent, détaché.

 

 

Sous prétexte de second, de troisième degré, on se met (tous) à tout regarder. A récuser tout esprit critique. A minimiser. A rejeter toute réflexion par cet argument = le second degré. Comme un passe droit à n'importe quoi. Dedans et dehors à la fois. Même acabit que "c'est pour rire" et toutes ces expressions fourbes de notre langue...

 

A se complaire dans le spectacle du médiocre, à se gausser de ces personnages qu'un animateur malin ridiculise... ou humilie.. ou glorifie... même panier tout ça. Espace de projection : par adhésion ou en rejet. Même adhérence malgré les degrés.

 

Et comme si ça ne suffisait pas, on en parle le lendemain entre nous, le clan de "ceux qui regardent". Et le surlendemain. On en reparle, on rajoute du commentaire sur du blabla, comme s'il y avait matière à commenter !

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Et ça créé des souvenirs, des références communes. Une "culture" ? Récits des temps modernes... l'art du spectacle serait-il tombé si bas ? 

 

Premier, second, ou dixième degré... : si on regarde, on regarde. Pourquoi se voiler la face ?

 

A suivre régulièrement ces émissions, quelque chose s'installe en nous, à notre insu. Je ne peux pas imaginer le contraire. Ou alors je manque d'imagination. De second, de troisième degré.

 

Gracia Bejjani-Perrot

Publié dans tout y passe

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